The Bees and the Rose de Provins
PART 1
Jessica : Carla Renault, bonjour ! Bienvenue sur French Voices ! Comment allez-vous ?
Carla : Ça va très bien, merci, bonjour !
Jessica : Alors, vous travaillez… vous êtes la gérante en fait d’une boutique de Provins qui s’appelle La Ronde des Abeilles. Donc dans cette interview, nous allons parler donc d’apiculture mais aussi de la rose de Provins. Donc, c’est deux choses qui ont en commun de… de piquer. Donc l’une par son dard et puis l’autre par ses épines.
Carla : Oui, exactement.
Jessica : On commence par quoi ?
Carla : On peut commencer par… bah la rose, hein.
Jessica : Par la rose. Alors, pourquoi cette rose célèbre ?
Carla : Oui, parce que c’est… parce que c’est l’emblème de Provins, hein. C’est celle-là qui a été ramenée par Thibaud IV en 1240 et qui vient de Syrie[1].
Jessica : D’accord donc elle est célèbre parce qu’elle a été rapportée de… d’une croisade ou d’une expédition ? Oui.
Carla : Voilà. C’est ça même. Elle a été rapportée par une croisade. Donc ils ont cultivé cette fameuse rose, donc qu’on appelait le châtel de… de la ville haute, quoi.
Jessica : Le châtel, donc un petit peu comme château ? Avec un accent circonflexe ?
Carla : Oui, voilà, c’est ça. Un petit peu comme le château. C’est le châtel.
Jessica : D’accord. Ouais.
Carla : Donc cette rose a une particularité. Elle ne fleurit qu’au mois de juin. Un mois.
Jessica : Ah, ah OK.
Carla : Un mois de floraison, pas plus.
Jessica : Est-ce qu’il y a un mot spécial pour décrire ce type de fleurs qui sont très éphémères ?
Carla : Euh bah justement, c’est ça, c’est le mot « éphémère ».
Jessica : Éphémère, d’accord.
Carla : Oui, carrément le mot « éphémère ». C’est ce que je dis à tous mes clients.
Jessica : Fleur éphémère.
Carla : Voilà.
Jessica : Ouais. Donc qui fleurit au mois de juin.
Carla : Elle fleurit au mois de juin. Elle a une odeur, mais qu’on voudrait toujours sentir parce qu’elle est… elle est sublime.
Jessica : Hm hm.
Carla : C’est une petite rose sauvage qui ressemble un petit peu à une églantine.
Jessica : Oui, d’accord.
Carla : Donc moi je la cultive. J’ai des champs de roses. J’ai presque 3000 mètres carrés de terrain de roses.
Jessica : Ah oui c’est pas dans votre jardin alors ?
Carla : Ah, non, non, non, non non (rires). Ce serait un peu petit dans mon jardin. Non, non. J’ai vraiment carrément des grands champs de roses. J’ai des jeunes qui viennent cueillir.
Jessica : Hm hm.
Carla : Que j’emploie. J’en ai une dizaine. Et on les ramasse, on les trie. C’est-à-dire, on trie pétale par pétale pour enlever toutes les cochonneries, qu’on appelle ça les… les impuretés.
Jessica : Hm hm.
Carla : Tous les feuilles, les pistils, les petits escargots, voilà.
Jessica : Pétale par pétale, ça fait beaucoup de travail ça !
Carla : Ah oui mais on a la… on a la technique.
Jessica : Ouais. Il y a une technique spéciale ?
Carla : Ah, oui, oui, oui. Parce que mon mari a construit des très grands tamis, hein.
Jessica : Oui.
Carla : On dépose donc toute notre récolte sur les tamis.
Jessica : Hm hm.
Carla : Et… comment ça s’appelle… et après je mets tous mes cueilleurs[2] autour et… et on trie.
Jessica : Hm hm.
Carla : Et après avoir trié, enlevé toutes les… les impuretés, on… comment ça s’appelle… on secoue, pour enlever toutes les étamines, les petits trucs jaunes, là.
Jessica : Oui.
Carla : On les secoue et après quand tout est bien propre, on les met en sacs et au congélateur. Comme ça, ça nous permet de fabriquer en un an.
Jessica : Voilà, donc vous faites un stock pour l’année entière en fait.
Carla : Voilà.
Jessica : Vous arrivez… ouais, d’accord. Ça représente quelle quantité de pétales de rose en… Je sais pas, volume, poids ?
Carla : Alors, en volume, cette année par exemple, nous avons fait 220 kilos de pétales de rose.
Jessica : D’accord.
Carla : Et sachant qu’un pétale ne fait pas un gramme.
Jessica : Ouais, ça fait énormément de travail, c’est votre période… c’est comme les vendanges en ce moment, là ouais.
Carla : Eh oui, par rapport aux vendanges, nous c’est plus… on n’a pas l’impression d’avoir travaillé parce que c’est tellement léger qu’on sait pas… voilà, alors…
Jessica : Ouais.
Carla : Non, non, c’est un travail gigantesque, hein. Et puis il faut y aller quoi.
Jessica : D’accord.
Carla : Et on fait ça à la fraîche. Le matin. Tous les matins, on va cueillir. On ne cueille pas l’après-midi, c’est que le matin.
Jessica : Il y a une raison spécifique à ça ?
Carla : Parce qu’après, la chaleur… le matin, elle est fraîche. Et la chaleur ça… comment vous dire, ça… ça ramollit un petit peu quoi.
Jessica : D’accord. Donc elles sont cueillies un petit peu après s’être ouvertes le matin, quand il y a encore un peu de rosée dessus ou…
Carla : Voilà, voilà.
Jessica : D’accord.
Carla : Et puis, bah disons que la rosée du matin, quand il fait très chaud, il y en a pas hein. Mais on y va par exemple… quand il fait très très chaud, on y va à 7 heures et demie[3] vous voyez. Parce que la rose de Provins, elle aime la chaleur. S’il y a pas de chaleur, elle s’ouvre pas.
Jessica : Ah, alors comment vous faites quand il y a des années qui… bah par exemple, cette année, au mois de… le mois de juin était très pluvieux, il doit y avoir des années froides ?
Carla : Ah bah là, cette année ça a été un petit peu la galère, quoi.
Jessica : Hm hm.
Carla : Il a fallu attendre vers 10 heures, 11 heures pour aller cueillir quoi. Parce qu’il y avait… on a manqué beaucoup, beaucoup de… de chaleur. Mais les autres… c’est la première année en 23 ans qui… qui est si mauvaise, hein.
Jessica : D’accord. Mais vous avez eu la même quantité de roses au final ?
Carla : Alors, cette année, j’ai cueilli donc 220 kilos, comme je vous ai dit tout à l’heure.
Jessica : Ouais.
Carla : Mais j’en comptais cueillir 320. C’est-à-dire qu’on a perdu 100 kilos.
Jessica : Ah ouah, ça fait un tiers de la récolte en fait.
Carla : Et voilà. Ah ouais, ouais. Ça fait un tiers de la récolte. Donc bon, on devait faire des nouveaux produits à base de rose de Provins et…
Jessica : Ouais.
Carla : Et en fin de compte, on fait pas de nouveaux produits, on va attendre l’année prochaine. Étant donné aussi qu’on a planté 1.200 rosiers… donc l’année prochaine ils seront opérationnels et on pourra faire d’[4]autres produits, d’autres nouveaux produits. Voilà.
Jessica : Alors, donc vous faites des produits à base de ces roses. Lesquels ?
Carla : Alors, on fait le… le… alors, il faut savoir qu’au Moyen-Âge, ça existait déjà, hein. Je n’ai rien créé.
Jessica : Vous reprenez des recettes médiévales en fait ?
Carla : Voilà, c’est ça.
Jessica : Hm hm.
Carla : Le miel rosa existait, hein. C’est… donc je fais du miel à la rose, hein, bien sûr. Le confit. Alors, ils appelaient ça des conserves. Donc ils offraient ça à des personnages illustres qui venaient visiter Provins. Donc ils offraient un… un pot de… de confit quoi. Des pétales de confiture.
Jessica : Oui.
Carla : Confit, c’est confiture hein.
Jessica : Ouais, oui. Alors donc moi je fais partie des personnages illustres maintenant parce que c’est vrai qu’on est repartis avec notre… notre pot de confit aussi.
Carla : Exactement. Voilà. Vous êtes un personnage illustre, oui (rires).
Jessica : Alors, c’est les pétales entiers qui sont dedans ?
Carla : Voilà, c’est que des pétales que je mets dedans hein, c’est ça.
Jessica : Ouais.
Carla : Après, on fait les bonbons, hein, à la rose de Provins. Les nougats, aussi.
Jessica : Hm hm.
Carla : On fait de la moutarde à la rose.
Jessica : Ah bon !? Je me rappelle pas avoir vu ça dans le mag/dans la boutique.
Carla : Ah oui. Ah, vous avez pas regardé tout, Jessica. Faut tout regarder (rires) ! Eh oui, je fais de la moutarde à la rose, qui est très bon avec des tomates, des concombres et puis de l’avocat. C’est délicieux.
Jessica : Ah bah il y a plus qu’à revenir alors.
Carla : Voilà, voilà. Vous êtes obligée de revenir, oui.
Jessica : Certainement, oui, oui. Hm hm.
Carla : Et on fait le pain d’épices à la rose de Provins. Aussi.
Jessica : Hum. Alors, j’ai jamais cuisiné avec des pétales de rose. Comment… on la cuisine ? Est-ce qu’on peut déjà choisir n’importe quelle variété, par exemple, je peux aller chez le fleuriste acheter des roses et puis… ?
Carla : Ah non, non, non.
Jessica : Non ?
Carla : Non. Parce que la rose de Provins, elle est comestible et non traitée. Toutes les roses ne sont pas comestibles.
Jessica : Il y en a qui sont même toxiques ou… ?
Carla : Ah bah oui, quand même. Ah bah c’est amer. Ça c’est plus que sûr, c’est amer.
Jessica : D’accord.
Carla : Vous pouvez pas les manger hein. C’est immangeable quand même. Non, non il faut faire très attention. Ça c’est une variété qui est… qui est culinaire.
Jessica : D’accord. Alors, comment… comment on cuisine la rose que vous… ? Vous pouvez me donner un exemple ?
Carla : Oui, alors moi pour… en premier, donc je mets les pétales de la rose de Provins dans le miel.
Jessica : Hm hm.
Carla : Voilà. Après je les retire. C’est… parce qu’elles sont gorgées d’odeur et gorgées de miel encore.
Jessica : Hm hm.
Carla : Et de là, je fais mon confit de pétales de rose, c’est-à-dire… un confit, c’est un sirop à base de sucre de canne et miel, hein. Et je rajoute les pétales de… de roses de Provins dedans.
Jessica : D’accord, ouais.
Carla : Donc il y a tout un système et vous pensez bien que je vais pas dévoiler mes secrets.
Jessica : Bon, alors, on va pas aller plus en avant dans les secrets industriels.
Carla : Voilà, je vous dis le gros de la chose mais il y a tout un secret que je vais pas dévoiler.
Jessica : D’accord. Bon vous avez piqué ma curiosité mais bon, j’ai pas le droit de savoir.
Carla : Non, non.
PART 2
Jessica : Alors, vous parlez de votre miel aussi. Donc vous êtes également apicultrice.
Carla : Oui, alors nous sommes apiculteurs avec mon mari, hein, on est tous les deux.
Jessica : Oui.
Carla : Alors, ça, c’est… ça date de… de très très vieux, ça. C’est… c’est quand j’étais jeune, hein. J’avais 23 ans quand on est devenus apiculteurs. C’est un essaim qui s’est trouvé à venir sous un pommier[5] chez moi.
Jessica : Hm hm.
Carla : Donc, c’est un animal protégé. On n’a pas le droit de le détruire. Donc…
Jessica : Ah les abeilles sont protégées, ont le statut de protégées ?
Carla : Oui. Ah oui, ah oui, les pompiers n’ont pas le droit de détruire du tout les… les abeilles. Mais sauf cas extrême quoi. Si ça se trouve dans une cheminée ou dans un mur, on peut pas faire autrement que de les détruire. Malheureusement, malheureusement.
Jessica : Oui. Sinon on les déplace ? Ouais.
Carla : Mais sinon, non, on va les récupérer, on va les chercher. Chez les… chez les personnes qui ont des essaims quoi. Et comment ça s’appelle… donc c’est venu dans… sous un pommier. Et avec mon mari, il y a eu un… un apiculteur qui est venu chercher cet essaim.
Jessica : Ouais.
Carla : Et de là il nous a demandé : « Est-ce que ça vous intéresse de vous lancer dans l’apiculture ? ». Nous, on a dit, on veut bien mais on n’y connaît rien.
Jessica : Ah, ça s’est fait vraiment par hasard.
Carla : Par hasard, vraiment par hasard. Et on a été donc à un rucher école pendant deux ans. On a appris, on a été à l’école pour apprendre le b.a.-ba[6] des…
Jessica : Ouais. Un rucher école ?
Carla : Oui, ça s’appelle un rucher école.
Jessica : D’accord.
Carla : C’est tenu par une personne… comment… un ancien… un ancien apiculteur.
Jessica : Hm hm.
Carla : Et c’est lui qui nous apprend tout. Le b.a.-ba. Il vous fait…
Jessica : Hm hm.
Carla : Alors, bien sûr, il vous fait… il vous fait passer un… un cadre de couvains avec plein de petites abeilles dessus. Quand vous connaissez… quand vous avez jamais touché… ce cadre de couvains avec plein d’abeilles, vous commencez à dire ouh là là, qu’est-ce que je dois faire, qu’est-ce que je dois faire…
Jessica : Oui !
Carla : Et donc, bah j’ai repassé ça tout de suite au voisin, hein. Parce que sur le… comment… le nombre de personnes qui étaient au rucher école, il y avait deux femmes sur… le restant, c’était que des hommes hein.
Jessica : Hm hm.
Carla : Maintenant, il y a de plus en plus de femmes qui sont apicultrices, hein. Ça y est, c’est… c’est pris dans les mœurs. Mais avant c’était des hommes, hein. Beaucoup d’hommes.
Jessica : Alors, c’est un travail physique par lui-même ou c’est plus que c’est impressionnant ?
Carla : Ah oui, c’est un travail physique !
Jessica : Ah oui ?
Carla : Ah, oui, oui, c’est un travail physique. Parce que après quand vous avez un rucher, faut aller chercher les hausses, c’est-à-dire le grenier.
Jessica : Oui.
Carla : Vous avez le corps de la ruche où la reine est toujours dedans. Et où elle fait ses bébés, hein.
Jessica : Oui.
Carla : Et en haut, on met une hausse. C’est… ça s’appelle le grenier. Il y a dix cadres et là elles font le miel.
Jessica : Hm hm.
Carla : Et c’est ça qu’on prend. Mais des fois, c’est très lourd, ça peut peser 25 kilos, vous voyez ?
Jessica : Ah bon ! D’accord.
Carla : Ah bah oui, hein. Quand c’est bien mené et tout ça, c’est… c’est assez impressionnant quoi. C’est… c’est très très lourd.
Jessica : Hm hm.
Carla : Donc il faut être à deux, hein, il faut être à deux pour aller chercher tout le miel et puis porter quoi. Surtout ça.
Jessica : Hm hm. Hm hm.
Carla : Donc voilà, quoi. Et… donc on prend ce grenier-là, on l’enlève et avant de mettre le… la hausse, on met une grille à reine pour pas qu’elle aille faire des… des petits en haut, dans… où on prend le miel, quoi. Sinon, on aurait des couvains dans les cadres. Et c’est pas très bien.
Jessica : Alors, je connais quelqu’un qui a des ruches et donc oui qui m’avait expliqué… c’est-à-dire, cette grille en fait elle laisse pas passer la… la reine mère…
Carla : La reine.
Jessica : Qui est plus grosse que les autres. Elle passe pas dans le trou, c’est ça ?
Carla : Voilà exactement. Mais les abeilles passent. Voilà.
Jessica : Oui, d’accord.
Carla : C’est pour éviter qu’elle puisse/qu’elle ponde[7] dans le… dans le grenier, quoi. Dans les hausses.
Jessica : Hm hm. Hm hm.
Carla : Ça c’est pour éviter. Comme ça, on a du miel bien comme il faut quoi.
Jessica : Oui, d’accord.
Carla : Elle, elle doit pondre que dans le corps… dans le corps de la ruche. Voilà. Et nous alors…
Jessica : Mais alors… oui, allez-y.
Carla : Nous, par exemple, pour nous, dans notre région, donc on commence au mois de mai et on finit vers le… fin août, quoi. Voilà, le moment des récoltes.
Jessica : D’accord. Et l’hiver les abeilles abernent/hibernent ?
Carla : Alors l’hiver les abeilles, elles hibernent, hein… comment… elles sont en semi-léthargie, c’est-à-dire, elles dorment à moitié.
Jessica : D’accord.
Carla : Semi-léthargie. Elles font une boule à l’intérieur du corps de la ruche. Et la reine a toujours 35 degrés, elle, elle est toujours dans les îles. 35 degrés, hein. Ouais.
Jessica : Hm hm.
Carla : Et les autres abeilles qui sont à l’extérieur rentrent à l’intérieur pour pas qu’ils aient froid. Et ils mangent le miel pour avoir de la chaleur. C’est pour ça que…
Jessica : D’accord et la… la reine, comment elle les conserve ses 35 degrés s’il fait par exemple zéro à l’extérieur ?
Carla : C’est les abeilles qui la chauffent.
Jessica : Ah OK ! Hm hm.
Carla : Elle, elle est au milieu. C’est une boule, une boule, elle est au milieu.
Jessica : Hm hm. C’est comme les manchots pour se réchauffer en fait. Ils font le… ils font la tortue en fait, c’est-à-dire qu’ils se mettent tous les uns contre les autres pour se tenir chaud.
Carla : Voilà. Eh ben elle, elle fait ça.
Jessica : D’accord.
Carla : Elle, elle est au milieu et elle bouge pas.
Jessica : Ouais.
Carla : Par contre, les abeilles à l’extérieur rentrent à l’intérieur, ainsi de suite. Comme ça elles se réchauffent et elles meurent pas.
Jessica : Ouais, elles… elles font des… elles prennent le relais en fait.
Carla : Voilà. Elles prennent le relais.
Jessica : Ouais, d’accord.
Carla : Ah oui, c’est intéressant. C’est très intéressant la vie de l’abeille, hein. Il y a vraiment… la vie de l’abeille, c’est bien simple, c’est la survie de l’espèce. Voilà.
Jessica : Hm hm.
Carla : Elles font toujours… pour eux, faut toujours travailler, travailler. Il y a pas de malades. Il y a pas de malades. Hein, si une abeille se sent… qu’elle sent qu’elle est faible, qu’elle est… qu’elle est malade, elle va mourir. Elle va pas mourir à l’intérieur de la ruche. Il faut que la ruche, elle soit propre.
Jessica : D’accord. Elle se fait pas entretenir entre guillemets.
Carla : Elle s’envole. Elle s’envole et elle va mourir. Voilà.
Jessica : Oh ouah. Hm hm.
Carla : Ah bah oui, il y a pas de malades ! Pas du tout.
Jessica : Donc vous êtes tombée amoureuse du monde des abeilles aussi ?
Carla : Ah oui, parce que c’est une société qui est bien, qui… qui pense… vraiment à la… à la société de survie de l’espèce. Et… et ils s’aident entre elles, quand ils ont beaucoup de travail, elles s’aident entre elles et tout. Non, non, c’est… c’est vraiment bien réglé parce que… on croit que l’abeille, elle est butineuse toute sa vie. Mais non, elle a des rôles. Des rôles à jouer. C’est-à-dire qu’au départ, quand elle naît, elle est nourricière. Elle s’occupe après des… des petits bébés à l’intérieur, hein.
Jessica : Hm hm.
Carla : Après, elle devient… comment que ça s’appelle ? Elle fait des glandes, il y a des glandes qui lui poussent et elle fait de la gelée royale pour nourrir la reine et les larves. Pendant trois jours.
Jessica : Ah oui, ouais. Trois jours ? Ah c’est rapide. Hm hm.
Carla : Ouais, pendant trois jours. Elles nourrissent les larves de… de gelée royale et après c’est une bouillie de miel et de pollen qu’on… qu’ils leur donnent pour qu’elles puissent… pour avoir après des autres abeilles. Mais la reine est toujours nourrie de… à la gelée royale. Et la reine, étant donné qu’elle est toujours nourrie à la gelée royale, elle vit quatre à cinq ans. Que l’abeille, elle vit que 35 à 45 jours.
Jessica : Ah c’est tout ?
Carla : C’est tout !
Jessica : Ah oui, d’accord.
Carla : Voilà. Après, elle a des glandes qui poussent et qui font de la cire. Elle est cirière.
Jessica : Ouais, d’accord.
Carla : Et après elle garde le trou de l’envol. C’est-à-dire, elle est gardienne.
Jessica : Alors, cirière, qu’est-ce qu’elle fait à part avoir de la cire sur les pattes ?
Carla : Alors, elles font… dans les alvéoles, elles font de la cire pour mettre le miel.
Jessica : Ah OK.
Carla : Voilà. Et après elle garde l’en/l’entrée de vol. Donc elle est gardienne.
Jessica : Ouais.
Carla : Et toujours avant de mourir, elle est butineuse.
Jessica : Ah, donc les abeilles qu’on voit dans le jardin, c’est… elles sont en fin de vie en fait ?
Carla : Voilà. C’est ça.
Jessica : Oh ! Hm hm.
Carla : Parce qu’il faut savoir qu’elle porte son propre poids en nectar. Essayez de porter votre propre poids.
Jessica : Ouais.
Carla : Eh ben vous allez pas vivre longtemps, hein.
Jessica : Hm hm. Oh !
Carla : C’est ça. Alors, comme elle porte son propre poids en nectar, mais elle en mange un peu pour pouvoir se donner du tonus.
Jessica : Hm hm.
Carla : Voilà, et le restant, elle le ramène à la ruche.
Jessica : Alors, je savais qu’il y avait différentes professions entre guillemets dans le… chez les abeilles mais je pensais que chacune naissait avec son rôle. Mais vous êtes en train de dire que en fait, toutes les abeilles ont tous les rôles, mais à un stade de leur vie.
Carla : Tous les rôles. Voilà.
Jessica : Hm hm d’accord.
Carla : Ah oui, oui, elles ont tous les rôles. Dès qu’elles naissent, elles… elles savent ce qu’elles ont à faire.
Jessica : Donc il y a des naissances en continu, même l’hiver ? Parce que vous dites, elles… elles vivent 30, 35 jours. Mais pour tenir chaud à la reine, il faut des nouvelles abeilles ?
Carla : Alors, c’est les dernières nées… c’est les dernières nées. Hein, celles qui naissent là, les dernières nées avant l’hiver, elles font six mois.
Jessica : Ah d’accord. Elles vivent plus que…
Carla : Voilà, elles font six mois pour pouvoir… déjà garder leur reine. Et pour pouvoir après, quand la reine, elle va… elle va commencer à pondre fin février, la reine.
Jessica : Hm hm.
Carla : Hein, fin février, elle commence à pondre. Et pour pouvoir nourrir les… les nouveaux bébés qui vont naître. Et après elles, elles vont mourir.
Jessica : D’accord.
Carla : Mais les dernières nées font six mois. Donc elles volent pas hein. Elles sont en semi-léthargie donc elles peuvent vivre six mois, quoi.
Jessica : Hm hm.
Carla : C’est… c’est le travail qui les tue, c’est… c’est simplement ça.
PART 3
Jessica : Et quand la reine meurt, toute la colonie… on appelle ça colonie ?… disparaît ou… ?
Carla : Ah ! Non, non, non. Ça c’est bien. La reine produit une phéromone, on appelle ça.
Jessica : Oui.
Carla : Une phéromone qui maintient tout… toutes les abeilles autour d’elle.
Jessica : Ouais.
Carla : Quand elle vieillit, sa phéromone diminue.
Jessica : Hm hm.
Carla : Les abeilles le sentent. Donc elles construisent des… des cellules royales. Alors, dans une barre, ils en construisent douze des cellules royales. Et ces cellules royales sont… les… c’est… c’est des abeilles hein, qui sont nourries qu’à la gelée royale.
Jessica : Ouais.
Carla : Donc elles vont devenir reines. Il y en a douze.
Jessica : D’accord donc une douzaine[8] ? Ah oui. Oui.
Carla : Voilà. Mais la première qui naît, hein, la reine.
Jessica : Oui.
Carla : La première qui naît, qui est vigoureuse comme tout, elle pique toutes les autres.
Jessica : Ah. Ouais, donc c’est un petit peu comme la filiation royale chez les humains. C’est l’aîné de la famille royale qui va succéder au trône. Ouah !
Carla : Voilà. Mais… mais là, la reine elle les tue les autres, hein.
Jessica : Par homicide.
Carla : Il faut pas deux… deux reines en même temps, hein.
Jessica : Hm hm.
Carla : Par contre, il arrive des fois qu’il y ait deux reines qui sortent en même temps. C’est une… alors, c’est un combat à mort hein.
Jessica : Ah oui !
Carla : Ah c’est un combat à mort. Il n’en faut qu’une. Et celle qui gagne, parce que les abeilles, elles… elles se poussent, elles regardent, elles attendent. Et celle qui gagne, elle devient… elle devient la reine et alors là, elle a toute sa cour à côté d’elle quoi, après. Ah oui, c’est très…
Jessica : Hm hm, hm hm. Alors tout ça, vous l’avez donc appris évidemment, mais est-ce que vous avez eu l’occasion de voir, en fait, de vos yeux ces… ces scènes-là où elles sont cachées dans les ruches ?
Carla : Oui. Oh bah il y a des… des films, il y a pas mal de… de choses même.
Jessica : Ah !
Carla : Dans une… ils ont montré une fois, sur… c’était à la télé, sur la 5[9], comment ça se passait dans une ruche parce qu’ils avaient mis une mini-caméra.
Jessica : Hm hm.
Carla : Donc on avait vu comment ça se passait. Mais dans les… on lit, on sait, hein. Il y a beaucoup de livres là-dessus quoi. Il y a eu beaucoup de recherches là-dessus, hein.
Jessica : D’accord, ouais.
Carla : Par contre, il y a un truc que je vous ai pas dit, c’est sur les mâles.
Jessica : Ouais.
Carla : Donc la reine dans une ruche, elle fait des mâles. Pour pouvoir féconder la reine.
Jessica : Hm hm.
Carla : Donc il y a une fécondation de reine. La reine elle sort une fois dans sa vie, juste pour se faire féconder.
Jessica : D’accord.
Carla : Elle… elle monte très, très haut. Et le mâle qui monte aussi haut qu’elle, il la prend et il la féconde. Et après, il y en a 10 autres aussi qui viennent aussi la féconder.
Jessica : D’accord. Donc le fait qu’elle monte très très haut, c’est un peu la sélection naturelle, c’est pour prendre le meilleur mâle en fait ?
Carla : Voilà, le meilleur mâle. Oui.
Jessica : Ouais, ouais.
Carla : Et après, elle rentre dans sa ruche parce qu’elle a… donc elle a été fécondée pour… pour au moins 4 à 5 ans quoi. Et les mâles…
Jessica : Ah oui !
Carla : Alors, les mâles ne servent à rien dans une ruche. À rien. Ils sont incapables de se nourrir. C’est les abeilles qui les nourrissent.
Jessica : Ouais.
Carla : Ils sont là, juste là. Mais par contre, au mois de juillet, hein, fin juillet, c’est vraiment un carnage dans une… dans la ruche, hein. Ils tuent tous les mâles.
Jessica : D’accord.
Carla : Il faut pas de mâles à nourrir pendant l’hiver. Parce que c’est des bouches, ça ferait trop de monde à manger.
Jessica : Hm hm.
Carla : Donc ils tuent tous les mâles. Il y a plus[10] un seul mâle. Voilà.
Jessica : Ouais.
Carla : C’est des amazones, hein. Ils leur arrachent les ailes et tout, hein. C’est… c’est vraiment… quand vous allez au rucher, vous voyez tous les mâles parterre.
Jessica : Ah !
Carla : C’est impressionnant, hein. Ah non mais…
Jessica : Ah oui, c’est une société fascinante. Ça me fait penser un petit peu à… bah aux colonies de fourmis en fait, c’est…
Carla : Oui, voilà, c’est ça, ça se rapproche un peu des fourmis, hein, quand même. Elles ont une société pareille.
Jessica : Ouais, ouais.
Carla : Ouais, c’est… c’est impressionnant quoi. C’est marrant quoi, de voir ça… oh ! Mais bon, c’est… c’est la survie de l’espèce, hein.
Jessica : Hm hm.
Carla : Après, la reine, elle pond, elle fait soit un mâle, soit une femelle, c’est elle qui décide.
Jessica : Hm hm, hm hm. C’est elle qui décide du… du sexe des abeilles ?
Carla : Ouais, si c’est… voilà, voilà. C’est elle qui décide.
Jessica : D’accord.
Carla : Oh c’est très intéressant.
Jessica : Et vous savez comment elle décide ?
Carla : Ah non. Bah là, ça non. Elle décide. Dans une ruche… je vais dire, par exemple, une petite ruche enfin non… Je vais dire, un kilo d’abeilles, c’est 10.000 abeilles.
Jessica : Ah oui ! Ouais, ouais.
Carla : Alors, nous on tourne autour de 50.000 abeilles, hein.
Jessica : Ouah.
Carla : Il y a à peu près 2500 mâles, quoi, à peu près. 2000 mâles, voilà, pas plus. Pas plus.
Jessica : Alors, avec ça, vous, vous vous faites piquer de temps en temps je suppose ?
Carla : Ouais, mais ça fait pas mal. Ils vont sur les… ils vont sur les fleurs.
Jessica : Ah bah, ça c’est vous qui le dites, je me suis fait piquer cet été… ouais.
Carla : C’est différent de la guêpe qui elle est charognard, qui va sur des trucs qu’est pas… pas très sain.
Jessica : Ouais.
Carla : L’abeille, elle va que sur les fleurs. Bon elle vous pique, ça vous fait mal sur le coup mais c’est rien. C’est rien.
Jessica : Bah, alors moi au début de l’été, j’ai marché malencontreusement sur une abeille et donc je me suis fait piquer[11] donc sous le pied… je crois que j’ai eu une légère réaction allergique, je n’ai pas plu/je n’ai pas pu poser le pied pendant 3 ou 4 jours. J’étais sur béquilles, c’était vraiment enflé.
Carla : Ouais.
Jessica : C’était un samedi soir, donc j’ai dû attendre le lundi pour aller à la pharmacie. Il y a rien, il y a rien qui est ouvert le week-end. Qu’est-ce que vous conseillez ? Qu’est-ce qu’on doit faire en fait en cas de piqûre ? Parce qu’on voit un petit peu de tout, hein, sur Internet.
Carla : Oui, oh bah moi, comment ça s’appelle… vous verriez les anciens comme ils font pour enlever… ils prennent un couteau et ils enlèvent le dard. Hop !
Jessica : Oui, ça il faut l’enlever rapidement. Ouais, hm hm.
Carla : Ouais, faut enlever le dard. Après faut laisser, hein, c’est… c’est la nature. Faut laisser, faut mettre une pommade. Et puis voilà, quoi, mais bon. C’est rien, hein. Il y en a qui mettent du vinaigre. Bon voilà.
Jessica : Ouais. Bon moi, ça a pas trop marché le vinaigre. Hm hm.
Carla : Non mais moi, ça… non, non. Je me suis fait déjà piquer mais ça m’a rien fait hein. J’ai même pas gonflé alors vous voyez. Et puis j’aime bien voir mes petites abeilles trottiner sur mes bras. Ça me fait rigoler.
Jessica : Oui, alors vous avez la combinaison intégrale quand même ?
Carla : Oui, oui, oui. Mais des fois, ça m’est arrivé, une petite abeille qui est coincée dans la maison, bah je la prends sur ma main et puis hop, je la mets dehors. Mais elle m’a pas piquée. L’abeille, elle pique…
Jessica : Ouais. Elle est pas agressive.
Carla : Vous savez, l’abeille, elle pique qu’au dernier carat, quand elle sent qu’elle va mourir, hein.
Jessica : Hm hm.
Carla : Parce qu’elle sait très bien que si elle vous pique, tout est arraché.
Jessica : Ouais, ouais.
Carla : Elle va mourir. Pas la guêpe. La guêpe, elle… la guêpe, elle, elle se rétracte. Son dard se rétracte. Mais la… l’abeille, non. Non. Elle meurt. Après vous avoir piqué, elle meurt.
Jessica : Ouais, ouais.
Carla : Alors, elle pique vraiment au dernier carat[12]. Mais si elle est pas coincée ou quoi que ce soit, elle vous fait rien. Elle vous fait rien.
Jessica : Hm hm.
Carla : Vous pouvez même la mettre sur votre main. Elle vous fera rien. Du moment qu’elle est pas coincée.
Jessica : Ouais. Alors ça c’est une belle… je pense que ça va être une belle leçon pour boucler parce qu’il y a beaucoup de gens qui… donc… alors, à part si on a… évidemment si on est fortement allergique, les… les réactions anaphylactiques etc.
Carla : Ah bah oui, ça, oui, oui, d’accord. Là, oui, oui.
Jessica : Il y a des gens qui ont peur des abeilles ou qui ne les aiment pas. Mais ce sont des… des insectes qui sont vraiment fascinants et qui sont pas du tout, donc, agressifs, hein.
Carla : Pas du tout, pas du tout. L’abeille est pas du tout agressif, hein, agressive. Non, non, elle est pas du tout agressive hein.
Jessica : Ouais. Et en plus, qui font du miel et qui font tellement de… de bonnes choses. Et qui sont importantes pour préserver donc l’écosystème, tout ça donc…
Carla : Bah oui.
Jessica : Voilà. Donc on peut essayer de sauvegarder les… les abeilles sont en danger ? Ouais.
Carla : Ah bah faut les protéger. Faut les protéger. Faut… faut faire très attention à elles. Et c’est de ça/de là qu’il faut énormément d’apiculteurs. Parce que plus il y a d’apiculteurs, plus il y aura d’abeilles.
Jessica : Ouais.
Carla : Parce que justement, on… on en élève quoi, c’est ça que je veux dire. Il faut qu’il ait énormément d’apiculteurs pour qu’on ait encore plein, plein, plein d’abeilles.
Jessica : Alors, ça sera le messa/le message de la fin. Donc si vous voulez… donc je parle aux auditeurs de French Voices… on a déjà fait, donc une interview avec donc un fauconnier[13], donc des aigles de Provins.
Carla : Oui.
Jessica : Donc si vous allez à Provins, ça vaut vraiment le détour. Ville médiévale. Spectacle de fauconnerie. Et puis allez aussi à la Ronde des Abeilles. Donc vous trouverez des produits à base de miel, de cire, donc de produits… comment on dit ? De produits apiculteurs, on dit ça ?
Carla : Oui, voilà.
Jessica : Et puis, donc aussi tout ce qui est à base de la fameuse rose de Provins.
Carla : Ah bah oui, c’est incontournable, hein, à Provins. Provins ne serait rien sans sa rose.
Jessica : Oui, c’est vrai que le spectacle des chevaliers re… retracent aussi, donc un petit peu…
Carla : Voilà.
Jessica : Donc le côté historique et ça commence avec donc… Thibaud IV, c’est ça ?
Carla : C’est ça ! Thibaud IV.
Jessica : Thibaud IV, qui donc apporte la… rapporte la rose de… de Damas. Et puis donc voilà, si vous allez voir… Carla Renault à La Ronde des Abeilles, vous pouvez lui dire bonjour de ma part. Et aussi vous pouvez lui demander, elle vous montrera, elle a un album photo… donc avec… où on voit donc ses roses,s son… bon ce que je pensais être votre jardin mais… en fait de votre…
Carla : Oui. Mon champ.
Jessica : Votre champ. Voilà, vous pouvez voir les… des vraies photos en fait.
Carla : C’est ça même.
Jessica : Je vous remercie beaucoup, beaucoup Carla de votre intervention et puis on se dit à la prochaine sur Provins parce que j’ai pas testé donc la moutarde à la rose.
Carla : Ah bah faut revenir, hein, là ! (rires)
Jessica : Ouais ! Je reviendrai. À bientôt !
Carla : À bientôt !
Jessica : Au revoir.
Carla : Au revoir.